Préparatifs et rencontre

Arrivée vers 9h30 ce samedi matin pour donner un coup de main, je retrouve un bon groupe de participants qui sont déjà là et qui mettent la main à la pâte! Après avoir mis les chaises et fixé la bâche au dessus de la cour, il n'y a plus grand-chose à faire. Je vais donc faire un tour dans le centre, je jette un œil à la bibliothèque plutôt bien fournie, même s'il reste encore de la place et si beaucoup de livres commencent à dater. Après la bibliothèque, les jeux: un petit gars escalade tout ce qu'il peut et descend à toute vitesse sur la barre des pompiers. Je m'approche un peu, grand sourire et il me salue de la main. Il descend et cours vers moi, me saute dans les bras!

Il doit avoir 4 ans, mais il ne me répond pas en anglais... Et vu qu'en Xhosa je suis pas très compétent, la communication est difficile! Je ne saurai même pas son prénom. Je sors mon appareil photo, il saute dessus, veut toucher, essayer... Je lui montre l'aire de jeu à travers le petit écran, il est emballé et le fait savoir. Son petit frangin sort de la maison, visiblement à peine réveillé. Je prends quelques photos du grand, puis quelques unes de la fratrie, puis je leur montre. Les yeux s'écarquillent, les rires fusent. Le grand veut prendre son frère en photo, mais avec des si petites mains et sans comprendre le palier autofocus du déclencheur, ça ne va pas très loin. Je remets l'appareil dans ma poche, le grand veut monter sur mes épaules... Son frangin nous regarde avec la main sur le front, comme si on était en haut d'une montagne... Lui aussi veut monter! Chacun son tour...

Puis le grand me montre l'appareil dans ma poche, je le ressors pour quelques photos. Et d'un coup, une quinzaine de gosses plus âgés arrivent en courant. Tout le monde veut sa photo, et certains insistent pour en prendre. Les doigts sur l'objectif, les mains qui tremblent, l'un qui essaie de prendre l'appareil à l'autre pendant qu'il prend une photo... Un joyeux bordel! Finalement, après avoir pris quelques photos et leur avoir montré le résultat, je vais voir si on a pas besoin de moi pour les préparatifs. Mon pote de 4 ans me suit, me sautant dans les bras dès que je ne suis pas trop loin d'une table qu'il peut escalader. Pas grand-chose à faire, on attend le chef du projet et le vice président qui ont une panne de voiture.

Cérémonialiser à l'extrême pour mieux cafouiller.

Quand les premiers "invités" arrivent, on nous distribue un A4 avec le programme de la journée, bien rempli. Je tique un peu à la lecture des premières et dernières étapes: prière. J'avais oublié que l'on était en des terres si religieuses! Après une introduction hésitante de notre responsable des évènements, puis une quinzaine de minutes pendant lesquelles il revient souvent nous demander d'attendre, je me rassure, pas de pasteur en vue, c'est un des pères qui finit par se dévouer pour dire une prière traduite en Xhosa. Après ça, Eddie, le chef de projet fait un speech un peu bordélique, qui devait reposer sur un PowerPoint qui est sur sa clé usb, qui est restée dans la voiture en panne... De toutes façons, l'écran du vidéo projecteur étant en plein soleil, on aurait rien vu!

Lui succède ensuite le vice-président étudiant de SHAWCO, plus pro, mais tout le monde commence à se répéter. Ayant pressenti que les discours allaient être longs et pas passionnant, notre master of ceremony avait quand même prévu des interludes: le premier sera une poésie d'un participant, qui est prêt pour devenir le conseiller de Thabo Mbeki en discours africaniste. Un pur produit de la Renaissance africaine prôné par le président, voilà qui doit faire plaisir au conseiller municipal ANC qui enchaîne avec son discours. Laissant entrevoir son tee-shirt vert jaune et noir avec la tête de Mbeki peinte façon imagerie soviétique africanisée, il explique combien l'e-mail est fabuleux, puisqu'on peut écrire à Johannesburg ou même à Port Elisabeth (si si!) sans avoir à attendre "des mois" pour que la lettre arrive. La poste sud africaine n'est sûrement pas des plus performantes, mais les délais qui se comptent en mois sont quand même réservé à l'international!

Le grand directeur de SHAWCO, que je n'avais jamais vu, est plus au point. Il insiste sur l'apprentissage réciproque entre le volontaire et le participant, espère que les participants feront tout à leur tour pour partager ce qu'ils apprendront ici et leur dit que sa porte leur restera ouverte, qu'il devrait être là pendant encore un bon nombre d'année. Suit une performance de Gum Boots par 5 participants, dont certains à qui il manque les bottes mais bon, c'est sympa. Pour ceux qui n'en ont jamais entendu parler, il s'agit d'une danse créée par les mineurs pour se donner du courage, des claquettes améliorées, puisque les bottes permettent de rajouter des sons en tapant dessus. Les parisiens et les brestois auront peut être vu cet hiver les affiches pour le spectacle Gum Boots, en tournée dans la ville lumière et dans la métropole océane.

Après le mot de remerciement des participants, la directrice du centre prend la parole et s'excuse de parler en Xhosa, mais elle veut que le message passe auprès des parents. Elle insiste sur les exigences d'être autonome avec un ordinateur de tous les employeurs ou presque, sur le besoin pour les familles de permettre aux enfants de venir, le long terme compensant largement la perte de main d'œuvre dans les tâches ménagères ou la garde de la fratrie. Puis elle coupe le ruban de la nouvelle salle, investie par les parents et quelques participants qui vont direct à leur poste et recommencent où l'on s'est arrêté mercredi dernier!

Début d'après-midi photo

Après la prière de clôture, le buffet est ouvert, hot dogs pour les enfants, plateaux de samoosas, de tourtes au bœuf, de poulet, d'épis de mais et de pommes de terres sautées, sympa. Après avoir mangé, mon pote, qui n'a pas manqué de me sauter dessus 3 ou 4 fois pendant les discours, revient à la charge... Il veut voir l'appareil photo. Les autres enfants arrivent en trente secondes et m'entourent, ils sont une vingtaine à m'implorer de les prendre en photos, sauf qu'ils passent leur temps à essayer de passer devant les autres pour être sur le cliché... Les poses sont en général souriantes, mais le chahut et certains qui posent avec les poings fermés, genre catcheur de bas étage, me mettent un peu mal à l'aise.

Plusieurs groupes de participantes, plus timides et plus disciplinées, me demandent quand même avec insistance d'être prises en photo. Je ne peux m'empêcher d'essayer de transposer la situation en France... Des ados qui demandent à un inconnu de se faire tirer le portrait, ça ne serait même pas imaginable! Les ptits mecs n'arrêtent pas, je calme un peu le jeu, en ignore certains qui ont déjà quelques portraits mais qui en veulent toujours plus et qui passent devant les autres, puis saturant un peu et pensant avoir pris tout le monde, après leur avoir montré les photos, je dis stop... Là ça devient surréaliste, ils en veulent toujours plus, certains me montrent même les quelques Rands qu'ils ont en poche! Quelque chose ne tourne pas rond!

Sauvé par le gong, les bus arrivent dans la cour et les volontaires commencent à se rentrer... Tous les gosses sont autour, certains continuent à me demander des photos à travers la vitre! Le ptit gars de 4 ans me dit bye bye, on démarre, avant de rester coincé par un troupeau de vaches qui font une mini-transhumance dans le township. Puis c'est parti, je ne reverrai pas Khayelitsha avant deux semaines, cette semaine, c'est déjà les vacances de Pâques. Au programme, promenades autour de Cape Town, je me réserve les dernières semaines pour voyager plus loin entre deux partiels.

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