L'avant

Fin juin 2004, avant de m'envoler pour l'Afrique du Sud, je m'intéresse enfin au choix de la solution que j'allais utiliser pour bloguer de là-bas. En gros, d'après les premières investigations, il y a un choix à faire, soit ouvrir un compte sur une plateforme de blog payante (je n'aurais pas voulu imposer de la pub ou être dépendant d'un service gratuit sans garantie sur le long terme), du style de Typepad, ou acheter un nom de domaine et un hébergement pour installer un logiciel de blog, du style de Dotclear, qui lui est gratuit.

Choix bien banal du logiciel gratuit contre une solution payante, me direz-vous. Il y a eu un peu de ça, mais ça n'a pas été le critère déterminant: après tout, j'étais prêt à consacrer 25€ par an pour l'hébergement et le nom de domaine... Choix dicté par la volonté de faire un blog qui reste en ligne longtemps après cette expérience, choix dicté aussi par la volonté de bricoler un peu, de maîtriser l'outil qui allait accueillir mes états d'âmes.

Quoi, il y a des standards pour le web?

Ayant une petite mais maintenant lointaine expérience de l'édition d'un site web associatif, je n'avais jamais imaginé que le code produit par mon logiciel de l'époque, Microsoft Frontpage, ne respectait pas les standards du web, des normes qui permettent d'assurer l'interopérabilité sur le web. Autrement dit que chacun puisse accéder au contenu avec l'outil de son choix, sur écran, sur papier, en lecture audio... Le site sur lequel j'ai bossé quelques soirées marchait bien pour la majorité des internautes, mais si l'on avait besoin de le lire sur un terminal spécial, du genre table braille, ce n'était pas gagné.

En commençant à bricoler un peu le thème bien documenté de Dotclear, je découvre les bonnes pratiques de ces standards. Je découvre un code propre et optimisé pour être léger et intéropérable, séparant bien le contenu de la forme. Du coup, cette dernière n'entrave pas les lecteurs qui ont des besoins spécifiques, elle peut alors être parfaitement homogène sur chaque page et peut être facilement modifiée pour tout le site, d'un coup. Sans compter l'avantage en temps de téléchargement, toutes les informations de style étant chargées une fois au lieu de l'être avec chaque page consultée.

Le logiciel et le choix

Là, je viens d'écrire l'outil de son choix, parce qu'en effet, on a le choix: le web, ce n'est pas ce e bleu qui traîne sur votre bureau, ça, c'est Internet Explorer, un navigateur parmi d'autres, qui soit-dit en passant est bien en retard sur sa concurrence. Sur les conseils glanés sur le forum de Dotclear, j'installe donc en septembre 2004 Mozilla Firefox, en version 0.9.

Là, je peux vous dire, ça fait un choc. Même en pré-version, je découvre des tonnes de fonctionnalités qui me manquaient sans que je le réalise vraiment. Je découvre qu'il y a une solution bien plus efficace pour naviguer sur plusieurs pages en même temps que d'ouvrir 10 fenêtres. Je découvre que les pubs qui m'agressaient ne sont pas une fatalité. Je découvre qu'un logiciel gratuit, produit par une entité à but non lucratif, est bien meilleur que celui de Microsoft. À ce moment là, je découvre que ce logiciel n'est pas seulement gratuit, il est aussi libre: tout le monde peut consulter son code source, et donc étudier son fonctionnement, ou construire un autre logiciel sur sa base.

Des logiciels libres par milliers

Là, tout s'enchaîne: tout en installant quelques équivalents libres à des utilitaires dont j'avais besoin, comme 7zip pour compresser et décompresser toutes formes d'archives au lieu de Winzip ou Winrar, ou encore Filezilla remplaçant avantageusement les clients FTP que j'avais pu utiliser jusque là. Et dans l'annuaire de Framasoft, on trouve des centaines de ces logiciels, pour quasiment tout faire ...

Pendant ce temps là, je commence à m'instruire sur les origines et les grands principes du logiciel libre et je découvre les applications de ces principes aux créations artistiques, avec la licence Art Libre et sa copyleft attitude, que j'adopte pour ma galerie de photos, avant d'opter pour une licence Creative Commons, qui s'applique aujourd'hui à tous mes écrits et photos. Pourquoi? Parce qu'interdire la copie de ces œuvres serait stupide: elle ne me nuit pas, elle ne me coûte rien... Je préfère autoriser dans un cadre bien défini, qui me garantit par exemple d'être cité comme auteur, plutôt qu'interdire à quelqu'un que ça intéresserait de se servir de ce que je livre ici à tous.

Et je ne suis ni le premier, ni le seul, loin de là... Allez faire un tour sur Wikimédia Commons pour découvrir des centaines de milliers de photos à télécharger, copier et recopier, ou sur Jamendo ou Musique Libre pour découvrir des artistes qui vous offrent leur albums en MP3 ou en Ogg, sans DRM, à écouter sans soucis...

Du blog au navigateur aux utilitaires à la suite bureautique...

Après m'être mis en confiance avec Firefox et les utilitaires, après en avoir appris plus sur les principes sous-jacents qui m'ont convaincu, pourquoi en rester là? En février 2005, j'entends parler des pré-versions d'OpenOffice 2, une suite bureautique complète, libre et gratuite, qui utilise elle aussi des standards et des formats ouverts pour garantir l'interopérabilité entre différents logiciels et donc la pérennité des documents qu'elle génère. Si ces soucis vous semblent abstraits, essayez donc d'ouvrir votre document vieux de 10 ans au format Microsoft Word 2 dans votre Microsoft Word 2003. Vous découvrirez avec émoi que votre document est illisible.

Après quelques tatônnements pour les fonctions les plus pointues du traitement de texte, j'arrive rapidement à faire ce que je faisais sous Word, avec en plus quelques fonctions bien pratiques comme la hiérarchisation des titres (séparation contenu/forme, quand tu nous tiens...) par les raccourcis claviers, l'export en PDF en un clic... Bref, pour peu qu'on ait un peu de temps devant soi et la volonté d'apprendre à dompter la nouveauté, la migration se fait sans heurts. Depuis, je n'ai plus utilisé Word, et à la faveur d'un changement d'ordinateur, je n'ai pas réinstallé la suite Microsoft Office.

Pour mon courriel, j'utilise désormais Mozilla Thunderbird, le petit frère de Firefox, qui a importé tous mes mails d'Outlook et qui me fait oublier combien de spam je reçois tous les jours, en les filtrant efficacement. Ce logiciel est peut être moins impressionnant que Firefox, mais il a le grand mérite d'être léger, simple et efficace.

...puis au système?

Puis en avril 2005, en confiance avec ces nouveaux logiciels, j'ai eu envie de voir ce que donnait une distribution de Linux qui commençait à faire un peu de bruit, Linux Ubuntu. Essai du live-cd, ce cd-rom qui vous permet de découvrir le système d'exploitation et tous les logiciels qu'il intègre sans l'installer et sans faire la moindre modification sur votre système d'exploitation actuel.

Puis j'ai installé ce système d'exploitation en plus de Windows XP sur mon PC, avec quelques coups de main bienvenus de Manu, explorant un peu plus ses possibilités quand j'avais un peu de temps... J'attends à présent la prochaine version pour l'installer sur mon nouveau PC, tout en suivant ses évolutions avec les live-cds. Gardez un oeil sur cette distribution, elle progresse vraiment de jour en jour, vers toujours plus de simplicité et de facilité pour l'utilisateur. Pour ne rien vous cacher, je ne suis pas encore tout à fait prêt à faire le grand saut, il me reste une ou deux applications qui n'ont pas encore leur équivalent. Mais je n'en doute pas, ce n'est qu'une question de mois...

En espérant que ce billet vous incitera à vous intéresser de plus près au logiciel libre si vous n'êtes pas encore converti, et si c'est le cas, à prendre conscience que la migration peut parfois prendre du temps et être progressive, mais qu'elle n'en est pas moins efficace. Merci en tous cas à Olivier Meunier, créateur de Dotclear, et à la DC_Team pour m'avoir mis un pied dans cet univers...

Ps: Je rassure toutes celles et tous ceux qui croieraient à une énorme faute de français dans le titre, il semble que je n'aie rien inventé en évoquant dans une même phrase DotClear et une scène de crime...