La Commission et la Banque centrale européenne commencent à s'émouvoir en public de la politique économique du nouveau Président. Celui qui s'était fait l'image d'un rigoureux gestionnaire des finances publiques, le temps d'une campagne, qui s'est permis de trouver le programme du PS trop cher et de feindre d'ignorer celui de Bayrou pour la réduction des déficits, est revenu en mode exercice du pouvoir.

Pour répondre à l'enjeu de la dette, des déficits, on en revient donc après avoir promis d'énormes économies à la solution traditionnelle, celle que l'on emploie depuis 30 ans. Pour revenir à l'équilibre, on se donne 5 ans. Comme il y a 5 ans. Et d'ici là, on suscite le grand choc économique qui va nous porter à 3% de croissance. Comme ce qu'on nous a promis dans les 5 dernières années. Je vous laisse déduire le résultat que l'on obtiendra dans 5 ans... Qu'importe, on se donnera encore 5 ans...

Je n'aurais pas la désobligeance de rappeler que pendant que nous repoussons l'échéance, l'Allemagne vient de passer de 3,3% de déficit à 0,6% en deux ans, ni que l'Italie continue ses efforts pour passer sous les 3%. À ceux qui ont cru que tout devenait possible, il faudra désormais préciser que le slogan s'applique partout, à l'exception du territoire français...

Cela n'émeut pas grand monde. L'absence de rupture - même tranquille - sauvegarde la tradition politique française en la matière, ce qui nous permet de replonger tranquillement dans le consensus le plus mou, en espérant pouvoir exploiter l'argument de la gestion calamiteuse des comptes à la prochaine campagne électorale, quand le traitement de la dette sera devenue le premier poste budgétaire.

Mais heureusement, nous avons à Bruxelles des amis bienveillants et suffisamment francs et patients pour nous avertir que nous faisons fausse route en abandonnant 3 à 4 milliards d'euros (soit 10% de notre déficit annuel) de recettes fiscales en pur effet d'aubaine pour les propriétaires de logements remboursant leur emprunt, sur un marché immobilier ne répondant déjà pas à la demande. Voici deux extraits de ce que l'on nous dit:

Le même président de la République ne peut à la fois appeler de ses vœux une meilleure gouvernance économique de la zone euro et prendre des dispositions qui risquent de faire déraper les comptes.(1)

Il existe sans doute des dépenses plus vertueuses(2)

Certes, le langage est diplomatique et ne correspond pas au format de la sacro-sainte petite phrase, seule digne d'intérêt pour le 20h... Mais la critique ferme sans être outrancière, met l'incohérence à nu, sans brandir les spectres de l'ultra-libéralisme, du fascisme ou de la dictature. Une belle leçon d'opposition efficace, qui pourrait bien nous servir dans ces cinq années où les gesticulations de la gauche n'auront comme réponses que de nouvelles gesticulations présidentielles.

Notes

(1)Citation attribuée à un commissaire européen, La Tribune

(2)citation attribuée à un commissaire européen (le même?), Le Monde