En arrivant à UCT, on a l'impression que les gens sont bien informés et vigilants. On est malgré tout dans un des pays les plus touchés au monde par le sida, et en compagnie d'une population plutôt privilégiée et éduquée. Puis, quand le sujet surgit dans un tutorial de politique, on découvre que certains ne savent pas exactement ce dont il s'agit et que personne n'a été se faire dépister (ça prend 5 minutes sur le campus). Statistiquement, 10% des étudiants sont atteints du virus.

Quelques chiffres a glacer le sang
  • Plus de 1600 personnes sont contaminées par le HIV chaque jour.
  • En 1998, l'espérance de vie moyenne à la naissance était de 60 ans. En 2008, elle devrait tomber à 40 ans.
  • 5,3 millions de personnes vivent avec le virus.
  • 370 000 personnes en meurent chaque année.
La population reste peu informée et rejette le problème

Dans les campagnes, il arrive que les gens croient que le virus est transmis par les préservatifs... Cela vous donne une idée. Les femmes, qui sont les plus durement touchées, sont aussi les plus régulièrement accusées de disséminer le virus. Les hommes, qui n'ont pas tous renonces à la polygamie, qu'elle soit reconnue ou cachée, sont bien sur innocents... Beaucoup de personnes refusent de croire a cette maladie, certains pensent que c'est une invention du pouvoir pour leur faire peur, et souvent, même après avoir perdu des proches, leurs comportements ne changent pas.

Mais au-delà, il existe un réel rejet des malades, même si la situation s'améliore lentement. En 2000, une femme militant pour l'accès aux médicaments dans le nord-est du pays a été lapidée a mort a son retour au village pour avoir déclaré a la télévision qu'elle était atteinte du sida.

La "réponse" du gouvernement

Les années Mandela, il faut le dire, n'ont pas vu un débordement d'action sur ce terrain, ce qui s'explique en grande partie par l'immense tache de reconstruction du pays... Pourtant, même depuis 1998, date à laquelle le vice6président devenu président, Thabo Mbeki, a lance un partenariat contre la pandémie, l'action reste discrète. D'après ce que j'en ai compris, ce partenariat semble être une façon de dire que l'Etat ne peut rien faire sans changement de comportement de la population. Au vu du slogan lance par le gouvernement, ABC (Abstain from sex, Be faithfull to your partner, Condomize, soit abstinence, fidélité et si les deux précédents ont échoué, préservatif), il ne fallait pas s'attendre a des miracles dans les pratiques sexuelles... Donc c'est un partenariat entre deux parties qui compte chacune sur l'autre pour faire le premier pas...

En 2000, comme si le problème ne demandait pas de mesures urgentes, Mbeki a choisi de remettre en cause le lien entre le HIV et le Syndrome d'Immunodéficience Acquise, question sur laquelle la majorité des scientifiques ne débat plus depuis plus de 20 ans, se concentrant sur le moyen de les combattre. Protestations générales (en dehors de l'ANC), Mbeki essaie de justifier ce choix: selon ses mots devant le Parlement, "un virus cause une maladie, mais le sida est un syndrome, donc le virus ne peut entraîner le sida". Il faudra la pression internationale et une déclaration de Mandela pour que Mbeki change d'attitude et mette en avant que les politiques qu'il a menées reconnaissaient ce lien, et qu'il voulait juste stimuler la recherche, au cas où... Depuis, on ne l'entend plus sur le sujet...

Sous la pression d'un vaste mouvement pour des traitements aux malades, un tournant à 180 degrés a été fait sur la question des antirétroviraux. Le gouvernement, après avoir prétexte que ces médicaments étaient potentiellement dangereux alors que certains députés de l'ANC les utilisaient pour eux ou pour des membres de leur famille, a décidé d'en fournir, d'où la lutte a l'OMC pour obtenir le droit de fabriquer des génériques. Le deuxième argument était le coût énorme d'une trithérapie. En fait, il est estimé que ce coût représente 20% des dépenses militaires du pays...

Au final, on se demande dans quelle mesure tous les efforts pour développer le pays ne seront pas vains, en l'absence d'un vrai combat contre la maladie...